Jour 7/11 : Les matières et les labels

 
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Pour adopter une garde-robe responsable, et trouver des vêtements de qualité, je parlais au jour 6 de l’importance des matières et des conditions de fabrication. Je vais donc revenir en détails sur les différentes matières, celles à privilégier et celles qu’il vaut mieux oublier, ainsi que sur les labels.

LES MATIÈRES

« La production des matières premières représente 15% de la contribution du produit au réchauffement climatique, 30% de sa contribution à la dégradation des écosystèmes, 18% de son impact sur les ressources, et 31% de sa consommation d’eau », peut-on lire dans « Mode responsable : le guide pour agir » de Deloitte Développement Durable. D’où l’importance de choisir correctement les matières qui composent notre dressing. 

« 79 milliards de mètres cubes d’eau sont employés chaque année dans le monde pour la fabrication textile. C’est la culture des matières premières qui exige ces quantités importantes, en particulier le coton. Selon l’organisation Water Footprint Network, celui-ci constitue le troisième consommateur d’eau d’irrigation au niveau mondial : en moyenne il faut 5 263 litres d’eau pour en produire 1 kilo, alors que les zones géographiques où il est cultivé connaissent une pénurie d’eau potable », écrite Majdouline Sbai dans son livre « Toujours moins cher mais à quel prix ? Huit solutions pour une mode éthique ».

« Le coton représente 25% de la production textile mondiale. Sa culture consomme un quart des pesticides utilisés dans le monde, dont certains classés comme hautement dangereux par l’OMS. », poursuit le rapport de Deloitte Développement durable. D’ailleurs, l’OMS estime que 22 000 personnes décèdent chaque année à cause de l’exposition aux pesticides nécessaires à sa culture. 

Une fois tous ces chiffres assimilés et digérés, vous comprenez pourquoi il est indispensable de se tourner vers du coton biologique, qui exclut l’utilisation de pesticides chimiques et réduit la consommation d’eau.

Du côté des autres fibres utilisées dans l’industrie textile, « les fibres synthétiques représentent les deux tiers des matières produites pour le secteur textile avec le polyester en tête (55 %). », note le guide de Deloitte Développement Durable, et le polyester est responsable du rejet des microplastiques dans les océans. Ces microplastiques représenteraient entre 15 % et près du tiers des 9,5 millions de tonnes de plastiques déversées chaque année en mer, et environ 35 % de ces microplastiques sont relâchés lors du lavage des textiles. « Un consommateur européen de poissons et fruits de mer ingère en moyenne 11 000 particules de microplastique par an. » Pour en savoir plus sur ce vaste sujet, je vous conseille d’écouter l’épisode avec Romy Hentinger de la Fondation Tara Océan. Et sinon, pour éviter le rejet de ces microplastiques vous pouvez utiliser le sac de lavage Le Guppyfriend

FOCUS JEAN : Le jean est l’un des vêtements les plus polluants au monde. Pourquoi ? Un jean nécessite à lui seul des centaines de litres d'eau (entre 7000 à 10 000 litres d'eau, soit l’équivalent de 285 douches), des pesticides, des colorants, des puissants détergents et des millions de kilomètres de transport. L'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) rappelle que pour le fabriquer, on utilise du coton cultivé en Inde ou en Afrique qui sera ensuite « teint dans un autre pays puis renvoyé en Asie pour la confection afin d’être finalement vendu en France et partout dans le monde ».

« À Xintang, ville de la Province Guandong en Chine, souvent perçue comme étant la capitale mondiale du jean, rappelle la journaliste Mélody Thomas dans cet article, 3 000 usines et ateliers produisent 300 millions de paires par an soit 800 000 par jour. Et la journaliste américaine Dana Thomas d’écrire (dans son livre Fashionopolis, le vrai prix de la mode et ce qui peut la sauver) : « L'usine locale de traitement des eaux a fermé ses portes il y a des années, laissant les usines déverser les déchets de teinture directement dans l'East River, un affluent de la Pearl River. Elle est devenue opaque ; la vie aquatique ne pouvait plus survivre. Greenpeace a rapporté que le lit de la rivière contient des niveaux élevés de le plomb, le cuivre et le cadmium. Les rues de Xintang sont bleues et de nombreux travailleurs auraient souffert d'éruptions cutanées, d'infertilité et d'infections pulmonaires. » »

L’autre problème c’est l’effet délavé, obtenu grâce à la technique du sablage. « Des ouvriers/ouvrières projettent du sable à haute pression sur les jeans, dans des petites cabines sans aération. Le sable contient 80 % de silice. La silice peut provoquer de graves maladies dans le cas d’une exposition prolongée, et la plus courante est la silicose, une maladie pulmonaire incurable », note l’ADEME dans son rapport « La mode sans dessus-dessous ».

Pour en savoir plus sur les matières, je vous recommande l’annuaire très complet de WeDressFair

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  • La soie de la paix ou soie « Ahimsa » est produite sans violence car la matière est traitée sans tuer le ver à soie. Dans le processus de fabrication traditionnelle de la soie, les larves de vers à soie sont tuées par ébouillantage.

  • Piñatex : matière fabriquée à partir de feuilles d’ananas, utilisée pour remplacer le cuir.

  • Lenzing Ecovero : matière écologique proche du tencel (soie artificielle), fabriquée à partir de pulpe de bois, issu de forêts certifiées durables par le label FSC. Les transformations chimiques occasionnées dans sa fabrication sont labellisées durables par le EU Eco Label.

  • Econyl : fibre de nylon 100% recyclée et recyclable, fabriquée notamment à partir de déchets plastiques collectés dans les océans. Pour en savoir plus je vous conseille d’écouter l’épisode avec Gwendoline Dessi, la créatrice de la marque de maillots de bain Coco Frio.

  • Viscose : matière artificielle, dérivée de la cellulose de bois. La pulpe végétale est extraite, et remaniée par traitements chimiques pour obtenir des filaments plus ou moins longs. Il y a plusieurs problèmes avec la viscose. Pour en produire, il faut de la soude caustique ou encore de l'acide sulfurique. Et parfois ces solvants polluants, non recyclés lors du processus de fabrication, sont déversés dans la nature. La fabrication de la viscose nécessite aussi beaucoup d'eau et beaucoup de cellulose de bois, ce qui participe à la déforestation.

  • Bambou : Les fibres de bambou ne sont pas une matière naturelle, ce sont des fibres artificielles chimiques. Elles sont obtenues à la suite d’un processus de transformation chimique lourd, notamment avec l’utilisation de disulfure de carbone pour extraire la cellulose de bambou et fabriquer les fils. Il s’agit d’un produit chimique non réutilisable ou recyclable, toxique, inflammable et qui cause une pollution de l’air importante.

LES LABELS

Dans une étude - que j’ai déjà citée - intitulée « Les Dessous toxiques de la Mode », et menée en 2011 sur 20 marques, dont Zara, Nike, Levi’s, ou encore C&A, Greenpeace a révélé la présence de produits toxiques polluants dans nos vêtements : des colorants azoïques (substance cancérogène utilisée pour teindre les vêtements), des traces de NPE - éthoxylates de nonylphénol, substance toxique classée comme « substance dangereuse prioritaire » par l’Union Européenne - retrouvées dans 63% des articles analysés, ou encore des phtalates (perturbateur endocrinien classé comme « substance extrêmement préoccupante »).

Pour éviter d’acheter des vêtements toxiques, il existe des labels - comme GOTS ou encore Oeko-Tex - qui nous garantissent l’absence de substances nocives.

Concernant le règlement REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals), il a été adopté par le Parlement européen pour protéger la santé humaine et l’environnement contre les risques liés aux substances chimiques : 181 substances sont référencées et nécessitent des mesures pour garantir qu’elles sont présentes en dessous d’un seuil de concentration. Les fournisseurs européens doivent disposer, depuis 2007, d’attestations sur les substances chimiques contenues ou utilisées dans la fabrication des articles produits ou importés dans l’espace économique européen et tenir informée l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA).

Les labels sont également importants pour garantir les bonnes conditions de fabrication, notamment le travail des enfants, un fléau dans l’industrie textile. « Selon l’OIT, 168 millions d’enfants travaillent aujourd’hui dans le monde, dont 85 millions ont une activité dangereuse. Le premier secteur employant des enfants est l’agriculture ; la culture du coton est principalement concernée, notamment en Inde. Et 12 millions d’enfants travaillent dans l’industrie », écrit Majdouline Sbai. 

Pour en savoir plus sur les labels, je vous conseille le site de WeDressFair

ATTENTION : Le label BCI (Better Cotton Initiative) émet des recommandations sur la culture du coton, mais pas de contrôles. Difficile donc d’affirmer qu’un vêtement BCI puisse être vraiment éco-responsable.

PETA : La mention “approuvée par PETA” signifie que le produit ne contient aucune matière animale, mais cela ne veut pas dire responsable ou éthique pour autant.

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🇫🇷 FOCUS MADE IN FRANCE 🇫🇷

Le « Made in France », ou « Fabriqué en France », est une mention attestant que le produit en question est de fabrication française. Mais il ne s'agit pas d'un label et il n'existe aucune définition précise du made in France. Le produit prend en fait l’origine du pays où il a subi la dernière transformation substantielle. Le « Made in France » peut ne recouvrir qu’un assemblage, voire une simple mise sous emballage.

Voici quelques labels qui peuvent vous aider à y voir plus clair :

  • Origine France garantie : selon le site du gouvernement, pour obtenir ce label, le produit doit respecter deux critères. Le lieu où le produit prend ses caractéristiques essentielles (montage, assemblage, finition) est situé en France, et 50% au moins du prix de revient unitaire est acquis en France.

  • Entreprise du Patrimoine Vivant : j’en parle dans certains épisodes du podcast, mais concrètement cette appellation distingue les entreprises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence.

  • France Terre Textile : au minimum 75% des étapes de fabrication ont été effectués en France.